J’aurais eu plus de chances de survivre à l’apocalypse des zombies* qu’à une pandémie virale. Au cours des dernières années, j’ai regardé de nombreux films et émissions de télévision qui m’ont appris ce dont j’aurais besoin pour vaincre les zombies, ce que je devrais avoir en main pour survivre à l’apocalypse, et aussi comment encaisser le choc causé par une rencontre avec les zombies et composer avec le respect mêlé de crainte qu’inspire leur sauvagerie. Hélas! je n’ai pas eu à braver les zombies, mais juste une menace silencieuse et invisible difficile à détecter et encore plus difficile à écarter.
Avec près de deux mois d’expérience dans la maîtrise des questions de survie liées à la pandémie (deux mois qui à vrai dire m’ont paru l’équivalent de dix ans d’expérience normale de la vie), j’ai finalement choisi d’apporter à mon mode de vie quelques changements qui, je l’espère, perdureront après la fin de la crise actuelle. Être prêt à faire face à un désastre est un choix et implique une aptitude qui varie en fonction de l’endroit où l’on vit et de sa tolérance au risque.
Les gens qui habitent dans l’allée des tornades* aux États-Unis sont confrontés à une menace plus ou moins permanente et prévisible; par conséquent, ils vivent dans un état de qui-vive perpétuel. Les habitants de la Californie vivent sous la menace constante des tremblements de terre mais ne sont prévenus que peu de temps avant les séismes; ils jouissent de longues périodes d’accalmie entre ceux-ci et bénéficient de rappels périodiques les incitant à se préparer. Indépendamment des circonstances, ils peuvent soit choisir de prendre des précautions, soit ignorer ces avertissements à leurs risques et périls. La FEMA (Federal Emergency Management Agency), l’agence fédérale de gestion des urgences, organise une enquête annuelle intitulée National Household Survey on Individual and Community Preparedness* (Enquête nationale auprès des ménages portant sur la préparation individuelle et communautaire). Le sommaire des résultats de 2018* montre une tendance générale à la hausse de l’état de préparation.
Chose intéressante toutefois, même la FEMA n’était apparemment pas préparée à une pandémie, car cette possibilité n’est pas incluse dans les scénarios de l’enquête. En supposant qu’on puisse généraliser pour tous les types de catastrophe potentiels, les statistiques n’indiquent pas un niveau de préparation très élevé dans l’ensemble.
En tant qu’aidant, j’ai pris l’habitude d’acheter pour un mois ou plus de produits de consommation afin de réduire les dépenses et le besoin de magasiner (j’ai écrit un autre article à ce sujet avant celui-ci). La pandémie a créé deux types de problèmes d’approvisionnement, le premier étant causé par les pénuries de produits comme le papier hygiénique, les lingettes pour bébés ainsi que le désinfectant pour les mains, et le second ayant trait aux perturbations des calendriers de livraison. J’ai la chance d’avoir en main un bon stock de papier hygiénique, parce que j’en ai commandé une grande quantité par erreur il y a quelques mois lorsque j’étais à la recherche d’un nouveau fournisseur, et une quantité appréciable de désinfectant pour les mains, étant donné que j’en utilise régulièrement. Les lingettes pour bébés sont devenues soudainement un produit très recherché que j’ai dû passer des heures à chercher sur Internet pour trouver une source fiable. Je possédais également une réserve de gants jetables, puisque j’en ai généralement une boîte ou deux en stock, mais j’ai été pris tout à fait au dépourvu par la nécessité de me procurer des masques.
Un de mes soucis avait trait à la disponibilité des médicaments sur ordonnance. Du fait que les compagnies d’assurances limitent la quantité de médicaments qu’on peut garder en réserve (d’habitude un mois par l’intermédiaire d’une pharmacie communautaire et trois mois si on les commande directement par courriel), j’étais inquiet qu’un médicament spécifique en vienne à s’épuiser ou que les activités des pharmacies soient perturbées. Heureusement, mes craintes se sont révélées sans fondement dans les deux cas.
Étant donné que j’habite depuis dix ans dans une région de la Californie prédisposée aux séismes, j’étais pleinement conscient des rappels incessants de l’importance de garder des lampes de poche, des piles, de la nourriture et de l’eau à portée de main en cas d’interruption des services. Les lampes de poche et les piles ne me posent aucun problème, mais garder en permanence un mois de nourriture et d’eau à portée de main est toujours problématique. Au début de la crise, j’ai vidé mon garde-manger à plusieurs reprises et trouvé de nombreux articles dont la date limite de conservation était vieille de plusieurs années.
Personne ne veut manger des raisins secs qui datent de 2014, à part peut-être les oiseaux.
Une fois que j’ai eu une bonne idée de mes lacunes en matière de préparation, il m’a été facile d’élaborer un plan visant à me permettre d’être mieux préparé la prochaine fois qu’un problème se posera. Cela dit, je sais que je n’arriverai pas à maintenir ce niveau de préparation maximal pendant longtemps; c’est la raison pour laquelle j’ai décidé de choisir quatre choses que je vais m’engager à faire sur le long terme.
Il y a quatre changements que je me propose d’apporter au-delà de la crise actuelle afin d’améliorer notre niveau de préparation en vue de la prochaine crise :
J’ai déjà placé des distributeurs dans la salle de bains de la chambre principale et celle des chambres d’amis, et ces distributeurs se sont révélés très utiles, que ce soit pour accomplir mes tâches quotidiennes d’aidant ou pour permettre aux visiteurs de se nettoyer les mains. Lorsqu’il sera de nouveau facile de se procurer du désinfectant pour les mains, je me propose d’installer des distributeurs muraux dans l’autre salle de bains, dans la cuisine et dans la pièce que ma femme utilise pour ses séances de thérapie. J’ai aussi l’intention d’insister davantage pour que les thérapeutes et leurs assistants se lavent les mains avant de pénétrer dans la maison pour prodiguer des soins à ma femme.
En dernier recours, je projette de conserver un stock de flacons de voyage pour les urgences éventuelles et pour les fois où nous ne serons pas à la maison.
À mesure que l’état de ma femme évoluait au cours des deux dernières années, j’hésitais de plus en plus à commander des articles dont elle avait besoin pour plus d’un mois au cas où les besoins changeraient. Maintenant que son état s’est stabilisé, je peux sans crainte doubler la quantité d’articles que j’ai l’habitude de commander afin d’en conserver un surplus à portée de main. Cela comprend le papier hygiénique, les lingettes pour bébés, les couches jetables, les produits d’hygiène buccale et d’autres produits de consommation. Ces articles ayant une longue durée de conservation, cela allégera mes inquiétudes par rapport aux contraintes d’approvisionnement. Je projette aussi de constituer une réserve adéquate de masques lorsqu’il sera plus facile de s’en procurer.
Quand cette crise a débuté à la mi-mars, j’ai commencé à m’en faire à l’idée que ma femme et moi pourrions ne plus être capables de nous rendre aux séances de thérapie. Certains de ses thérapeutes, tels que son psychologue et son thérapeute visuel, ont effectué la transition aux rendez-vous en ligne, mais la physiothérapie ou l’ergothérapie posent un problème un peu plus embêtant.
J’ai acheté rapidement un vélo couché semblable à celui que ma femme utilise pendant ses séances de physiothérapie et, dans les temps à venir, je me propose d’améliorer notre capacité à organiser plus de séances de physiothérapie et d’ergothérapie ici à la maison. Si l’installation à la maison est bonne pour ma femme, elle me donne également la chance de faire de l’exercice.
Afin d’accroître notre autonomie, je veux conserver davantage de dispositifs médicaux à portée de main. J’avais déjà un brassard de tensiomètre, mais j’ai commandé un thermomètre à application cutanée ainsi qu’un oxymètre de pouls après le début de la crise. Enfin, aussitôt que je pourrai en trouver un, je vais commander un défibrillateur externe automatique (DEA) à usage domestique.
Heureusement, aucun de mes amis proches n’a succombé au coronavirus, mais un ami de longue date est décédé des suites d’une crise cardiaque, l’ambulance ayant été retardée en raison de la demande actuelle. Posséder un défibrillateur est plus dans mon intérêt que dans celui de ma femme, mais les avantages sont discutables, puisqu’il devra y avoir à proximité une personne en mesure de l’utiliser en cas de besoin et que je vais devoir montrer à ma femme comment s’en servir.
Note de la rédaction : Les DEA sont fabriqués et vendus conformément aux directives approuvées par la FDA (Food and Drug Administration), qui est le Secrétariat américain aux produits alimentaires et pharmaceutiques. La FDA peut exiger de toute personne qui fait l’acquisition d’un DEA qu’elle présente une ordonnance du médecin pour cet appareil.
Depuis que je vis en Californie, j’ai appris que même les plans de préparation les mieux élaborés peuvent se révéler insuffisants, car leur succès dépend de l’endroit où vous vous trouvez et de ce que vous faites quand un problème surgit.
Il est difficile de faire des préparatifs pour les tremblements de terre, étant donné que personne ne peut être certain d’être à la maison au moment des séismes. En revanche, il peut être plus facile de prendre ses dispositions pour une pandémie, même si la personne surprise à voyager risque de passer un mauvais moment. Quoi qu’il en soit, faire fi des préparatifs suggérés n’est pas la bonne réponse, car ceux qui agissent ainsi sont susceptibles de mettre en danger la vie de leur propre famille et de ceux qui essaient de les aider. Le secret consiste à trouver le juste milieu entre des préparatifs utiles dans l’immédiat et des préparatifs à plus long terme.