Ce que la SP m’a appris sur l’amitié
Comme dit le vieil adage, « c’est dans les moments difficiles que l’on reconnaît ses vrais amis ». Et comme tout cliché, il contient un élément de vérité.
Avant mon diagnostic de SP, j’étais très entourée par un cercle d’amis. Même si nous avions tous une vie bien remplie, nous prenions le temps de prendre des nouvelles les uns des autres, de rester en contact et, en général, de nous encourager et de nous consoler au besoin. Parce que j’ai vécu à divers endroits, ces amitiés m’ont permis de m’enraciner et de créer de nombreux souvenirs et récits en commun.
Mais après mon diagnostic de sclérose en plaques, la scène de mes amitiés s’est trouvée complètement désertée. Des collègues de travail – que je considérais comme des amis – ont commencé à recourir à l’intimidation, ce qui a finalement abouti à un recours en justice.
Dans ma vie personnelle, d’autres amis ont cessé de m’appeler. Ils en avaient peut-être assez que j’annule ou que je déplace constamment une rencontre, alors que la fatigue causée par la SP commençait à s’abattre sur moi. En plus du désarroi que la sclérose en plaques avait entraîné dans ma vie, l’avenir s’ouvrait sur l’inconnu et la peur. Une situation dont certains de mes amis ne tenaient pas à faire partie.
En quittant ces ténèbres, j’ai constaté que quelque chose d’étrange s’était produit. Les gens sur lesquels je croyais pouvoir compter en toutes circonstances avaient disparu de ma vie. Cependant, d’autres m’ont surprise en me sortant du précipice dans lequel j’étais tombée et se sont révélés de véritables amis.
Ils m’ont écoutée parler sans arrêt de mes peurs, de mes symptômes, et ont enduré mes lamentations sans fin sur cette injustice. Ils m’ont rendu visite quand je n’arrivais pas à sortir de mon divan. Ils m’ont prêté une oreille attentive, apporté des magazines et aidée dans les tâches domestiques. En se rendant au travail, une amie a même laissé à ma porte des gâteaux qu’elle avait faits.
Les premières années qui ont suivi mon diagnostic ont été sombres, alors que j’étais aux prises avec les symptômes de la sclérose en plaques, que je cherchais un nouveau travail et que j’aidais mon fils. J’étais vraiment seule. La vie m’avait poussée dans une direction opposée à celle de mes amis et j’étais complètement désorientée. Avec le recul, c’était comme si mes vraies amies avaient tenu des bougies dans l’obscurité pour me guider et me faire savoir que, en fait, je n’étais pas seule.
Je comprends maintenant à quel point mes actions étaient nécessairement égoïstes, alors que j’ai façonné une nouvelle vie à partir des débris de l’ancienne. J’étais obsédée par l’idée d’en savoir le plus possible sur la sclérose en plaques. J’étais accaparée par l’affaire juridique en cours au travail et qui me déchirait. Je me préparais au traitement de la sclérose en plaques. Et de plus, j’aidais mon fils à entrer au secondaire, tout en essayant désespérément de mener une vie la plus « normale » possible. Malgré tout, certains amis m’ont aidée à traverser cette période turbulente, tout en reléguant leurs propres problèmes au second plan.
D’autres connaissances – que je saluais à peine au sortir de l’école et lors des séances d’entraînement au rugby de mon fils – sont intervenues et l’ont conduit à l’entraînement. Elles sont allées à la soirée des parents en mon nom et ont emmené mon fils à la plage, à des soirées pyjama et à des grilladeries.
Après m’être remise sur pied (sans jeu de mots!) et avoir appris à faire face aux embûches quotidiennes de la SP, je savais que j’avais aussi changé sur le plan de l’amitié. Je n’étais plus capable de passer une soirée au bar à vin local. Les toilettes étaient éloignées, l’endroit bondé de monde. Les excursions d’une journée n’étaient pas recommandées. Les sorties improvisées sont devenues chose du passé. Pourtant, j’étais toujours moi-même et je voulais être la meilleure amie possible, malgré les circonstances.
Il était important que je réalise que l’amitié fonctionne dans les deux sens. J’ai donc essayé de trouver une nouvelle façon d’être une amie – et tant qu’à faire, d’en être une bonne. Puisque je rentrais du travail à 14 heures tous les jours, j’ai fait savoir à mes amis qu’ils étaient les bienvenus en tout temps en après-midi. Évidemment, ce n’était pas comme s’attabler quelque part en ville, mais j’avais du bon café et des biscuits.
En soirée, je les invitais à prendre un verre de vin, confortablement assis sur des divans moelleux au chalet. J’allumais des bougies, je tamisais les lumières et mettais de la musique. Encore ici, impossible de recréer l’ambiance d’une sortie entre amis, mais ce n’était pas si mal. De plus, nul besoin de bien s’habiller.
La sclérose en plaques a amélioré ma capacité d’écoute, et désormais je me concentre beaucoup plus sur le moment présent. Si je suis avec un ami à ma table de cuisine, il devient la personne la plus importante pour moi à ce moment-là. Mes amitiés ont maintenant une signification beaucoup plus profonde. Je ne vois peut-être pas mes amis aussi souvent qu’auparavant, mais notre lien est plus fort.
Les amitiés que j’ai nouées sur mon blogue et sur Twitter sont tout aussi importantes. Il me suffit d’envoyer un gazouillis un peu triste un mauvais jour, et les réponses que je reçois m’encouragent à tenir.
Lorsque vous vivez avec une maladie chronique, l’amitié prend plusieurs formes. Si je pouvais donner un conseil à toute personne qui traverse une situation semblable, ce serait :
« Cherchez à être l’ami dont vous aviez besoin aux heures les plus sombres ». Si vous pouvez rendre l’amour et la gentillesse qui vous sont témoignés, vous vous sentirez toujours soutenu.
« Les bons amis sont comme les étoiles. On ne les voit pas toujours, mais on sait qu’ils sont toujours là ».